SYRIE : ajouter la guerre à la guerre ne résoudra rien.
Le drame syrien qui se joue sous nos yeux avec près de 100 000 morts en deux ans de guerre civile est avant tout un échec patent de la communauté internationale. A force de calculs stratégiques hasardeux et de protection d’intérêts divergents, elle s’est révélée incapable de peser politiquement pour contrer et faire plier le régime de Bachar el-Assad.
Si l’usage des armes chimiques constitue un crime de guerre, la gravité d’une décision de recours à la force impose de mesurer toutes les conséquences qui en découleront.
La première interrogation est celle de la légalité.
Une intervention sans mandat de l’ONU rendrait de fait l’opération militaire illégale et illégitime auprès de la communauté internationale. Et ce n’est pas la supposée caution de la Ligue arabe qui pourrait combler ce manque de légitimité.
D’ailleurs, à ce stade, nous ne sommes pas certains que l’utilisation des armes chimiques vienne exclusivement du camp de Bachar el-Assad. L’opposition syrienne, qui pour certaines de ses composantes ne sont pas démocratiques et même proches d’al-Qaïda, a elle aussi, en son temps, utilisé des armes chimiques.
Veillons à éviter de répéter les erreurs de la deuxième guerre d’Irak, dont nous cherchons encore les armes de destructions massives.
Le droit et la sagesse imposent que nous attendions les conclusions des inspecteurs de l’ONU avant de nous prononcer.
La seconde interrogation est celle de la déstabilisation de la région
Au niveau local, la situation n’est pas aussi manichéenne que nous l’imaginons. Ce conflit ne se résume pas à l’émancipation d’un peuple du joug de son dictateur, comme on tente de nous le faire croire. La guerre civile en Syrie est complexe par ses racines ethniques, religieuses et historiques. Elle ne peut se satisfaire d’une réponse simple.
Modifier l’équilibre des forces par la paralysie des moyens du régime risque de profiter aux forces les plus radicales. De vacillante, la situation sécuritaire régionale ne peut que sortir dégradée, voire simplement annihilée pour l’Irak, le Liban, et la Jordanie.
La troisième interrogation est celle de l’efficacité limitée d’une intervention
Les conséquences possibles d’une intervention en termes d’escalade de la violence et d’impact sécuritaire régional exigent une prise de recul qui dépasse la réaction émotive ou l’opération vengeresse.
Or, c’est précisément l’efficacité même de cette intervention qui interpelle.
Quel est l’intérêt de lancer des frappes aériennes sur des cibles du régime, alors que nous savons que tous les centres de commandement et de communications ont déjà été évacués ?
Punir le régime de Bachar el-Assad n’est qu’une réaction de court terme. La solution à ce conflit est avant tout politique.
Les responsables de notre diplomatie devraient garder leur sang-froid. Le devenir de la Syrie et le peuple syrien méritent mieux que nos approximations et nos incertitudes.
La France doit être force de proposition avec un plan d’action pour relever la Syrie en associant tous les acteurs de la région ; à commencer par l’Iran qui cherche manifestement à rétablir le dialogue.